Béji Caid Essebsi: La facette répressive de l’ancien Ministre de l’Intérieur.
Béji Caid Essebsi s’est toujours présenté comme faisant partie de la tendance libérale au sein du PSD (Parti Socialiste destourien rebaptisé RCD en 1988) et ce depuis 1970. Cependant, Béji Caid Essebsi ne s’est jamais expliqué sur son passage au Ministère de l’Intérieur ( Béji Caid essebsi est Ancien directeur de la sureté nationale (janvier 1963- juillet 1965), Secrétaire d’Etat à l’intérieur (juillet 1965-septembre 1969).
En 2002, Il a réalisé un Entretien avec Michel Camau et Vincent Geisser.( Ouvrage : Bourguiba la trace et l’héritage », Ouvrage collectif, sous la direction de Michel Camau et Vincent Geisser. : 01/05/2004 Editeur : Karthala. Entretien Béji Caid Essebsi, pp 577-601. Entretien réalisé par Michel Camau et Vincent Geisser en avril 2002. Transcription revue et corrigée par Béji Caid Essebsi. )
Cependant,dans ses mémoires publiées récemment (elles s’étendent sur 515 pages quand même) « Habib Bourguiba , le bon grain et l’ivraie », Béji Caid Essbsi ne cite pas cette interview peu connue en Tunisie. L’examen de la page 417 de ses mémoires renseigne sur la présence de 21 annexes rattachées aux mémoires de Béji Caid Essebsi… mais on ne trouve pas son interview avec les deux chercheurs français.
Et pour cause, c’est dans cette interview qu’on constate la facette répressive de Béji Caid Essebsi.
A la page 597 de son entretien avec Michel Camau, en réponse à une question portant sur les conditions de détention terribles à la prison de Borj Erroumi , Béji Caid Essebsi a déclaré :
« Les conditions étaient difficiles parce que Borj Er Roumi était une ancienne prison française, celle de la Légion étrangère. Personnellement, je ne l'ai visitée qu'après. J'ai vu que c'étaient des caves humides. Mais auparavant, je ne le savais pas ».
Pourtant, Noura Borsali a rapporté dans son article : « Le complot de décembre 1962 : Fallait-il les tuer ? »( Noura Borsali, 26-12-2002- Noura Borsali- Réalités- Hebdomadaire tunisien,repris dans son ouvrage : Bourguiba à l’épreuve de la démocratie »), les propos d’un prisonnier à Borj Erroumi, Temime H’maidi Tounsi :
« Les autres condamnés ont été amenés, le 2 février, au bagne ottoman de Porto Farina, au dépôt de munitions du temps des Turcs où enchaînés aux pieds, ils ont passé sept ans dans des conditions très dures et sans aucune nouvelle de leurs familles. Ils ont été conduits ensuite à la prison Borj Erroumi de Bizerte où ils ont vécu dans des damous ,sorte de dépôt de munitions du temps des Français à 37 marches (à environ 15 m) de profondeur. Les murs, selon les témoignages recueillis, suintaient continuellement : 3 à 4 litres par jour si bien que “ nous grelottions hiver comme été à cause de l’humidité. Quant au soleil ou aux rais de lumière, nous n’y avons eu droit qu’après nos sept années passées à Porto Farina et notre transfert à Bizerte. Pendant plus de sept ans, nous avons vécu dans
l’obscurité de jour comme de nuit ”, confie Temime H’maidi Tounsi (lire plus loin le témoignage de Ben Yochrett). Ils ont reçu la visite de quelques personnalités politiques comme Taïeb Mhiri, Béji Caïd Essebsi , Mohamed Farhat, Hédi Baccouche, Tahar Belkhodja, Fouad Mbazaa, le gouverneur de Bizerte… “ Après la visite de Taïeb Mhiri, le système est devenu plus dur.
Je me souviens encore de la phrase de Béji Caïd Essebsi :
« Pour celle du complot de décembre 1962, j'étais en fonctions puisque, comme je l'ai déjà dit, j'ai été nommé directeur de la Sûreté à cette occasion. Mais elle a été traitée par le ministère de la Défense ».
Azzedine Azzouz confirme à la page 229 de son ouvrage ( "L’Histoire ne pardonne pas ». Azzedine Azouz . Tunisie 1939-1969. ) que " l’affaire du complot de décembre était bien jugée devant le tribunal militaire, boulevard Bab-Mnara, dans l’immeuble du ministère de la défense nationale".
Cependant, le même Azedine Azzouz relate dans les pages 223-224-225-226, les conditions dans lesquelles se passaient les interrogatoires qui se déroulaient dans les locaux du ministère de l’intérieur dirigé par Béji Caid Essebsi :
Extrait de la page 224 de l'ouvrage de feu Azzedine Azzouz :
« Je ne peux décrire ici ce lue j'ai entendu ce soir-là : tortures, supplices, cris inhumains, coups de cravache, étouffements à l'eau, brûlures à la cigarette et à l'électricité, supplice de la bouteille, etc. Je ne pouvais en croire mes oreilles et n'imaginer vivre en plein vingtième siècle, dans une Tunisie moderne et indépendante sous la présidence de Bourguiba. Un policier de stature colossale fit irruption dans la pièce où j'étais, une cravache à la main et tout en sueur à force de frapper les détenus. Me regardant, il me lança : « Estime-toi heureux de ne pas subir le même sort puisque tu es libre... »
Même les policiers qui assuraient le service de nuit arboraient un air dégoûté et grinçaient des dents. L'un Parmi eux, un vieux, remarqua : « C'est une honte, on a jamais vu ça même du temps du colonialisme français. » (fin)
A la page 598 de l’Entretien de Béji Caid Essebsi, en réponse à une question portant sur les conditions de détention des militants de Perspectives (l’extrême gauche), Béji Caid Essebsi a déclaré :
« Je ne sais pas si vous me croyez, mais je l'apprends maintenant. » ( Ce n’est qu’en 2002 qu’il a appris que les conditions de détention des prisonniers politiques en 1967 étaient inhumaines ! Alors qu’en 1967, il était bel et bien le Ministre de l’intérieur !)
Et quand Vincent Geisser et Michel Camau insistent sur les conditions de détention des opposants qui ne pouvaient pas échapper à l’ancien ministre de l’Intérieur, Béji Caid Essebsi déclare :
« Cela dit, je ne sais pas exactement de quoi les perspectivistes se plaignent. Ils disent qu'ils ont été victimes de violences ».
Il faut croire qu’en 2002, l’Ex Ministre de l’intérieur ne savait pas de quoi se plaignaient les opposants de Habib Bourguiba qui ont sauvagement torturés alors qu’il était le Ministre de l’intérieur.
http://samibenabdallah.rsfblog.org/archive/2009/05/24/beji-caid-essebsi-la-facette-repressive-de-l-ancien-ministre.html
En 2002, Il a réalisé un Entretien avec Michel Camau et Vincent Geisser.( Ouvrage : Bourguiba la trace et l’héritage », Ouvrage collectif, sous la direction de Michel Camau et Vincent Geisser. : 01/05/2004 Editeur : Karthala. Entretien Béji Caid Essebsi, pp 577-601. Entretien réalisé par Michel Camau et Vincent Geisser en avril 2002. Transcription revue et corrigée par Béji Caid Essebsi. )
Cependant,dans ses mémoires publiées récemment (elles s’étendent sur 515 pages quand même) « Habib Bourguiba , le bon grain et l’ivraie », Béji Caid Essbsi ne cite pas cette interview peu connue en Tunisie. L’examen de la page 417 de ses mémoires renseigne sur la présence de 21 annexes rattachées aux mémoires de Béji Caid Essebsi… mais on ne trouve pas son interview avec les deux chercheurs français.
Et pour cause, c’est dans cette interview qu’on constate la facette répressive de Béji Caid Essebsi.
A la page 597 de son entretien avec Michel Camau, en réponse à une question portant sur les conditions de détention terribles à la prison de Borj Erroumi , Béji Caid Essebsi a déclaré :
« Les conditions étaient difficiles parce que Borj Er Roumi était une ancienne prison française, celle de la Légion étrangère. Personnellement, je ne l'ai visitée qu'après. J'ai vu que c'étaient des caves humides. Mais auparavant, je ne le savais pas ».
Pourtant, Noura Borsali a rapporté dans son article : « Le complot de décembre 1962 : Fallait-il les tuer ? »( Noura Borsali, 26-12-2002- Noura Borsali- Réalités- Hebdomadaire tunisien,repris dans son ouvrage : Bourguiba à l’épreuve de la démocratie »), les propos d’un prisonnier à Borj Erroumi, Temime H’maidi Tounsi :
« Les autres condamnés ont été amenés, le 2 février, au bagne ottoman de Porto Farina, au dépôt de munitions du temps des Turcs où enchaînés aux pieds, ils ont passé sept ans dans des conditions très dures et sans aucune nouvelle de leurs familles. Ils ont été conduits ensuite à la prison Borj Erroumi de Bizerte où ils ont vécu dans des damous ,sorte de dépôt de munitions du temps des Français à 37 marches (à environ 15 m) de profondeur. Les murs, selon les témoignages recueillis, suintaient continuellement : 3 à 4 litres par jour si bien que “ nous grelottions hiver comme été à cause de l’humidité. Quant au soleil ou aux rais de lumière, nous n’y avons eu droit qu’après nos sept années passées à Porto Farina et notre transfert à Bizerte. Pendant plus de sept ans, nous avons vécu dans
l’obscurité de jour comme de nuit ”, confie Temime H’maidi Tounsi (lire plus loin le témoignage de Ben Yochrett). Ils ont reçu la visite de quelques personnalités politiques comme Taïeb Mhiri, Béji Caïd Essebsi , Mohamed Farhat, Hédi Baccouche, Tahar Belkhodja, Fouad Mbazaa, le gouverneur de Bizerte… “ Après la visite de Taïeb Mhiri, le système est devenu plus dur.
Je me souviens encore de la phrase de Béji Caïd Essebsi :
“ Ils tiennent encore ? ”, nous dit encore Temime H’madi Tounsi »
A la page 598 (Entretien Béji Caid Essebsi) encore, à propos du complot de 1962, Béji Caid Essebsi joue la confusion en précisant :« Pour celle du complot de décembre 1962, j'étais en fonctions puisque, comme je l'ai déjà dit, j'ai été nommé directeur de la Sûreté à cette occasion. Mais elle a été traitée par le ministère de la Défense ».
Azzedine Azzouz confirme à la page 229 de son ouvrage ( "L’Histoire ne pardonne pas ». Azzedine Azouz . Tunisie 1939-1969. ) que " l’affaire du complot de décembre était bien jugée devant le tribunal militaire, boulevard Bab-Mnara, dans l’immeuble du ministère de la défense nationale".
Cependant, le même Azedine Azzouz relate dans les pages 223-224-225-226, les conditions dans lesquelles se passaient les interrogatoires qui se déroulaient dans les locaux du ministère de l’intérieur dirigé par Béji Caid Essebsi :
Extrait de la page 224 de l'ouvrage de feu Azzedine Azzouz :
« Je ne peux décrire ici ce lue j'ai entendu ce soir-là : tortures, supplices, cris inhumains, coups de cravache, étouffements à l'eau, brûlures à la cigarette et à l'électricité, supplice de la bouteille, etc. Je ne pouvais en croire mes oreilles et n'imaginer vivre en plein vingtième siècle, dans une Tunisie moderne et indépendante sous la présidence de Bourguiba. Un policier de stature colossale fit irruption dans la pièce où j'étais, une cravache à la main et tout en sueur à force de frapper les détenus. Me regardant, il me lança : « Estime-toi heureux de ne pas subir le même sort puisque tu es libre... »
Même les policiers qui assuraient le service de nuit arboraient un air dégoûté et grinçaient des dents. L'un Parmi eux, un vieux, remarqua : « C'est une honte, on a jamais vu ça même du temps du colonialisme français. » (fin)
A la page 598 de l’Entretien de Béji Caid Essebsi, en réponse à une question portant sur les conditions de détention des militants de Perspectives (l’extrême gauche), Béji Caid Essebsi a déclaré :
« Je ne sais pas si vous me croyez, mais je l'apprends maintenant. » ( Ce n’est qu’en 2002 qu’il a appris que les conditions de détention des prisonniers politiques en 1967 étaient inhumaines ! Alors qu’en 1967, il était bel et bien le Ministre de l’intérieur !)
Et quand Vincent Geisser et Michel Camau insistent sur les conditions de détention des opposants qui ne pouvaient pas échapper à l’ancien ministre de l’Intérieur, Béji Caid Essebsi déclare :
« Cela dit, je ne sais pas exactement de quoi les perspectivistes se plaignent. Ils disent qu'ils ont été victimes de violences ».
Il faut croire qu’en 2002, l’Ex Ministre de l’intérieur ne savait pas de quoi se plaignaient les opposants de Habib Bourguiba qui ont sauvagement torturés alors qu’il était le Ministre de l’intérieur.
http://samibenabdallah.rsfblog.org/archive/2009/05/24/beji-caid-essebsi-la-facette-repressive-de-l-ancien-ministre.html
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