Transition démocratique en Tunisie: Qu’est ce qu’une Constituante ?
Qu’est ce qu’une Constituante ?
Assemblés pour débattre du contenu d’une constitution, la loi des lois. Les « constituants », élus par le peuple, élaborent l’architecture de base du fonctionnement de l’État. Il s’agit de définir non seulement les limites des pouvoirs que le peuple délègue aux gouvernants, mais également des contours des différentes juridictions propres à chaque sphère d’exercice du pouvoir. Une constitution énonce également les grandes valeurs aux sources de la vie commune. Un projet de constitution, soumis au peuple après un exercice en profondeur de démocratie participative.
L’idée est ancienne, aussi ancienne que la tradition démocratique et républicaine. Cette belle idée qui veut que le seul pouvoir légitime vienne du peuple. Pas des rois, ni des despotes, mais du libre consentement des populations. Aux États-Unis, cet acte de naissance d’un État que représente le processus constituant moderne s’est déroulé à Philadelphie dans le cadre de deux conventions constitutionnelles où les insurgés américains jetaient les bases de leurs futures sociétés en rupture avec le colonialisme britannique et la souveraineté du roi. En s’appuyant sur une autre souveraineté : celle du peuple.
En France, la première Constitution a été voté du 3 au 13 septembre 1791. Fondée sur le principe de la souveraineté du peuple et la séparation des pouvoirs, elle institua une monarchie constitutionnelle. En dehors de son œuvre constitutionnelle, l'Assemblée constituante a procédé à des réformes fondamentales touchant à : l'administration (uniformité et centralisation); la justice (égalité devant la loi, suppression des parlements, élections des juges, abolition de la torture), les finances (égalité devant l'impôt, suppression des impôts indirects, nationalisation des biens qui appartenaient à l’État); l'économie (décisions favorisant le libéralisme économique), sécurité (elle sécularise l'état civil confié à des officiers intègres), religion (elle supprime les ordres réguliers).
En Tunisie, dans ce débat sur la Constituante, il faut l’élire de façon démocratique pour qu’elle soit représentative des forces vives de cette révolution afin de décider de l’organisation des pouvoirs publics et du système de gouvernement le plus apte à éviter le retour à l’autoritarisme et au pouvoir personnel. Comment l'élire? (i) solliciter des candidats de juristes spécialistes en lois constitutionnelles, des spécialistes en droits de l'homme, des économistes chevronnés, des vétérans politiciens en retraite intègres qui n'ont jamais servi la double dictature Bourguiba-Ben Ali (ii) informer la population de leurs CV et de leurs compétences (iii) rendre public leurs casiers judiciaires (iv) assurer un financement équitable de leurs compagnes électorales (v) fixer au préalable le nombre des membres de la constituante (200 à 300). C’est à cette assemblée constituante de se prononcer sur les questions vitales pour bâtir une seconde république.
Dans un premier temps, cette Constitution, nous la souhaitons courte et facilement amendable. Elle doit pouvoir respirer, laisser aux générations futures le soin de la parfaire. Courte aussi pour nous forcer collectivement à aller à l’essentiel et à permettre au plus grand nombre d’en débattre. Je dois insister sur la dimension républicaine de la forme de l’État, sur l’importance des mécanismes d’exercice de la souveraineté populaire, sur le caractère pacifique de notre société, sur la propriété et le contrôle publics des ressources et des richesses.
Chafi Chaieb, doctorant écologue à l’UQÀM (Canada)
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