Les instances financières ne doivent pas restituer les avoirs du dictateur déchu et de sa belle famille au gouvernement provisoire actuel qui n’a aucune légitimité, sinon ils restitueront l’argent du voleur aux complices du voleur qui les a nommé lui-même

... Comme tous les dictateurs soutenus par l’Occident, Ben Ali et son clan se sont bien sûr enrichis considérablement. Interrogé par Libération le 18 janvier, l’avocat William Bourdon de l’organisation Sherpa, qui s’est déjà illustré dans une plainte concernant les biens mal acquis de trois dirigeants africains, signale que Ben Ali avait la veille, le 17 janvier, vidé ses comptes en Suisse, ce qui « pose d’ailleurs des questions sur l’attitude de ces banques (1). ». En effet, en faisant cela, elles se montrent complices et devraient pouvoir être sanctionnées pour cette complicité à l’heure où la Suisse dit ne plus vouloir être montrée du doigt comme pays organisant le recel et le recyclage d’avoirs frauduleux ou criminels … En date du 17 janvier, la Commission arabe des droits humains, Sherpa et Transparence International France ont déposé une plainte auprès du procureur de la République de Paris contre différents membres de la famille Ben Ali concernant les avoirs détenus en France. La semaine suivante ces trois organisations ont publié un communiqué de presse attendant du procureur qu’il adresse au juge des libertés et de la détention, le plus rapidement possible, une requête pour demander le gel de ces avoirs, comme la loi le lui permet depuis juillet 2010 (2). En effet, seul un gel rapide des avoirs permettrait d’éviter leur évaporation vers des juridictions non coopératives. Ce qui s’est passé avec les banques suisses montre bien l’urgence d’une telle procédure. La famille de la femme de Ben Ali, la famille Trabelsi, détiendrait, quant à elle, plusieurs millions d’euros sur des comptes bancaires français, des appartements et des propriétés à Paris et en région parisienne, un chalet à Courchevel et des propriétés sur la Côte d’Azur (3). Cela concerne uniquement la France, or il est très probable que le clan Ben Ali a des avoirs dans d’autres pays et certainement dans des paradis fiscaux. Selon une source diplomatique, l’Union européenne (UE) a ensuite acté jeudi 20 janvier le principe d’un gel des avoirs de Zine El Abidine Ben Ali et de ses proches. Après avoir cautionné Ben Ali pendant fort longtemps en fermant les yeux sur son régime (4), les médias occidentaux n’hésitent plus à parler de dictature et de régime corrompu mais on n’entend jusqu’à présent pas parler des corrupteurs. Il ne saurait pourtant y avoir de corrompus sans corrupteurs. Le nouveau gouvernement tunisien débarrassé de tous membres de l’ancien régime pourrait entamer une procédure judiciaire en Tunisie même, tout en demandant la collaboration d’États étrangers où des fonds auraient été détournés. Toutes ces procédures ne doivent pas être menées par l’actuel gouvernement provisoire qui n’a aucune légitimité, sinon on restituerait l’argent du voleur aux complices du voleur qui les a nommés lui-même durant son règne. On verra si la loi française du 9 juillet 2010 permet d’accélérer réellement les choses. Il s’agit, également, d’utiliser la Convention des Nations unies contre la corruption dite Convention de Mérida (5) entrée en application le 14 décembre 2005. Au 1er janvier 2009, elle avait été signée par 140 pays et ratifiée par 129 (6) ...

Par Virginie de Romanet coordinatrice du Comité de l’Annulation de la Dette du Tiers Monde (CADTM Bruxelles) virginie@cadtm.org (Titre proposé par Épicentre)
Suivez le lien pour lire l’article intégral : http://www.cadtm.org/Les-defis-a-venir-de-la-revolution

(1) http://www.liberation.fr/monde/0101 (2) Loi n° 2010-768 du 9 juillet 2010 visant à faciliter la saisie et la confiscation en matière pénale parue au JO n° 158 du 10 juillet 2010 (3) « La petite entreprise très profitable du clan Trabelsi », Le Figaro, 17/01/11, cité par le communiqué de presse de Transparency International http://www.transparency.org/news_r (15) Le 1er janvier 2008, la Tunisie est le premier pays de la rive sud de la Méditerranée a avoir intégré la zone de libre échange avec l’Union européenne (16) On peut particulièrement mentionner les deux articles suivants : Article 51 : Disposition générale 1. « La restitution d’avoirs en application du présent chapitre est un principe fondamental de la présente Convention, et les États Parties s’accordent mutuellement la coopération et l’assistance la plus étendue à cet égard. » Article 43 Coopération internationale 1. « Les États Parties coopèrent en matière pénale conformément aux articles 44 à 50 de la présente Convention. Lorsqu’il y a lieu et conformément à leur système juridique interne, les États Parties envisagent de se prêter mutuellement assistance dans les enquêtes et les procédures concernant des affaires civiles et administratives relatives à la corruption ». (6) « Biens mal acquis. A qui profite le crime ? » CCFD, juin 2009.

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