TUNISIE : La préservation des intérêts économiques de l'occident le pousse à aider la contre révolution

… Les investisseurs européens, qui profitent de la proximité géographique, sont très présents en Tunisie. Les intérêts états-uniens l’étaient jusqu’à présent beaucoup moins, ce qui peut expliquer l’attitude des États-unis et la position d’Obama, qui attendra la fuite de Ben Ali pour s’afficher en faveur de la révolution. Cela contraste fortement avec l’attitude des États-unis concernant le Honduras, où les multinationales états-uniennes sont toutes puissantes.
Étant donné ce à quoi les États-unis nous ont habitués, on peut également penser qu’il s’agit d’évincer les investisseurs européens au profit d’intérêts états-uniens car les États-unis essaient depuis plusieurs années de gagner de plus en plus de positions dans une Afrique richement dotée en matière premières. Ils veulent ainsi profiter du déclin relatif de la position de la France et ne pas laisser l’offensive sur ce terrain à la seule Chine de plus en plus présente et active partout en Afrique.
L’ancienne métropole coloniale, la France a toujours soutenu la dictature de Ben Ali en se faisant la propagatrice de la vision d’un pays moderne, ouvert et exemplaire vis-à-vis des intérêts étrangers. En effet, la France compte 1250 entreprises établies en Tunisie. Le flux d’investissement français s’est monté en 2008 à 280 millions d’euros, investissements concentrés dans le secteur textile puis les industries, mécaniques, électriques et électroniques ainsi que la plasturgie et le secteur aéronautique (1).
Quant à la Belgique elle a également d’importants investissements en Tunisie, plusieurs grandes entreprises ayant délocalisé leur production vers ce pays. Le syndicaliste Freddy Matthieu signale que 148 entreprises belges sont présentes en Tunisie et qu’un millier d’entreprises belges exportent vers ce pays. Ce qui représente un niveau similaire à celui de l’Allemagne alors que l’économie allemande a une taille beaucoup plus importante car dès les années 1960, le premier train de délocalisations avait eu lieu vers la Tunisie (2). Ben Ali était de ce fait bien vu de la Belgique et une revue de presse de toutes les interventions consacrées à la Tunisie montre que Ben Ali n’avait fait l’objet que d’une seule dénonciation pour violations des droits humains de la part de politiques belges. (3) Ces deux pays ne sont pas les seuls, la Grande Bretagne est le premier investisseur dans le secteur des hydrocarbures, l’Espagne et l’Italie sont également bien positionnées ainsi que l’Allemagne …
Les lendemains de la Tunisie sont en ce mois de février 2011 tout à fait indéterminés, car l’issue favorable de la révolution en cours n’est pas assurée. En effet, la contre-révolution s’active sur tous les fronts et bénéficie d’appuis à l’extérieur. On a vu le poids des intérêts occidentaux, et on comprend l’inquiétude des puissances européennes. L’enjeu est de s’assurer le contrôle de la situation. C’est ainsi que le Parlement européen a prévu de recevoir le nouveau premier ministre pour donner la caution de l’Union européenne au nouveau gouvernement. Gouvernement illégitime puisqu’il comprend encore des membres liés à l’ancien appareil d’État. Montrer notre refus  comme européens de voir nos gouvernants et les instances internationales comme l’Union européenne soutenir un gouvernent illégitime ne peut qu’aider à renforcer une telle révolution. C’est la raison pour laquelle un appel à manifester est lancé au Parlement Européen avec comme revendication la reconnaissance de l’ensemble du peuple tunisien et la mise en place d’un gouvernement qui ait la confiance du peuple …

Par Virginie de Romanet coordinatrice du Comité de l’Annulation de la Dette du Tiers Monde (CADTM Bruxelles) virginie@cadtm.org (Titre proposé par Épicentre)

Suivez le lien pour lire l’article intégral : http://www.cadtm.org/Les-defis-a-venir-de-la-revolution
(1) Propos tenus lors de la soirée organisée par le Front des gauches le 28 janvier à Bruxelles. (2) Il s’agissait d’Yves Leterme après les élections présidentielles « gagnées » par Ben Ali avec 89,6%. (3) http://www.liberation.fr/monde/0101

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